Eau - Evolution d'un écosystème aquatique

Publié le par Clem

Lorsque l’équilibre se rompt

Un écosystème est avant tout un système dynamique, il naît, il se développe, il meurt. Ce n’est pas un système stable, figé dans un état qui serait le seul état viable pour lui. C’est un système qui évolue naturellement et en permanence sous l’effet de perturbations naturelles, un système dont on peut même dire qu’il ne survit que grâce à ces perturbations. Les crues, par exemple, sont indispensables au maintien des cours d’eau car elles permettent un rajeunissement des végétations riveraines, un remaniement des fonds qui évite leur envasement, ainsi qu’une régulation de la dynamique des populations. Ces perturbations sont d’ailleurs un facteur de maintien de la biodiversité : en leur absence, le phénomène de compétition entre espèces peut en effet devenir prépondérant et permettre à l’une d’elles de prendre le dessus.
L’évolution d’un écosystème n’est pas régulière, elle se fait par à-coups. Sous l’effet d’une perturbation, l’écosystème change d’état. Puis il se met à évoluer progressivement de façon plus ou moins rapide, vers un nouvel état d'équilibre, processus dont il sortira comme rénové. Parfois cependant, l'écosystème peut perdre cette aptitude à retrouver un état d’équilibre, on dit alors qu’il perd sa capacité de résilience. Cela se produit lorsque la perturbation est trop importante, lors de certaines pollutions graves par exemple, et que les seuils dits d'irréversibilité sont dépassés.

La capacité d’épuration des écosystèmes peut ainsi être outrepassée. Celle-ci est en effet limitée car le processus de dégradation des matières organiques par les bactéries aérobies est lent et ce d’autant plus que la teneur en oxygène du milieu aquatique est faible ou qu’il fait froid. La matière organique non dégradée a donc une tendance naturelle à s’accumuler. Mais que ce cumul devienne trop important et le milieu n’est plus à même de tout dégrader et de réaliser ainsi son auto-épuration : l’équilibre naturel est rompu.
Un tel surcroît de matières organiques biodégradables peut provenir de l’apport naturel mais excessif de nutriments, ou du rejet par les sociétés humaines d’effluents riches en de telles substances. Il peut aussi être la conséquence d’un déficit "naturel" en oxygène dissous de certains écosystèmes, lequel ralentit le processus de biodégradation. Ce type de déséquilibre s’observe facilement par exemple dans les marais dont les eaux stagnantes sont peu oxygénées.

Des modifications irréversibles des écosystèmes aquatiques peuvent également survenir lorsque trop de substances toxiques pour les espèces vivantes sont introduites dans ces écosystèmes, provoquant une raréfaction, voire une disparition de certaines espèces fragiles. L’introduction, intentionnelle ou non, de nouvelles espèces peut aussi être à l’origine de profondes modifications de l’écosystème.

Pour bien comprendre comment évolue un écosystème aquatique, il faut connaître les mécanismes subtils qui président à son fonctionnement. Ceux-ci sont globalement connus, mais d’une extrême complexité en raison d’interactions multiples et changeantes dans l’espace et dans le temps. Ceci oblige à des études minutieuses prenant en compte l’histoire de l’écosystème et ses particularités locales.


L’eutrophisation de l'écosystème

L’eutrophisation est une forme singulière mais naturelle de pollution de certains  écosystèmes aquatiques qui se produit lorsque le milieu reçoit trop de matières nutritives assimilables par les algues et que celles-ci prolifèrent. Les principaux  nutriments à l’origine de ce phénomène sont le  phosphore (contenu dans les phosphates) et l’azote (contenu dans l’ammonium, les nitrates, et les nitrites).

L’eutrophisation s’observe surtout dans les écosystèmes dont les eaux se renouvellent lentement et en particulier dans les lacs profonds.
Un lac reçoit en effet, de manière naturelle et continue, quantités de matières nutritives apportées par les torrents et les eaux de ruissellement. Stimulées par cet apport substantiel, certaines algues croissent et se multiplient de manière excessive. Cette croissance s’effectue dans les couches d’eaux superficielles car les végétaux ont besoin de lumière pour se développer. Ces algues en excès conduisent, lorsqu’elles se décomposent, à une augmentation de la charge naturelle de l’écosystème en matières organiques biodégradables. Dans les profondeurs du lac, là où les algues mortes viennent se déposer, les bactéries aérobies qui s’en nourrissent prolifèrent à leur tour, consommant de plus en plus d’oxygène. Or en l’absence d’une circulation suffisante des eaux, ce qui est souvent le cas dans un lac profond, le fond du lac est peu oxygéné et les bactéries finissent par épuiser l’oxygène des couches d’eaux profondes. Elles ne peuvent plus dégrader toute la matière organique morte et celle-ci s’accumule dans les sédiments. On dit que le lac vieillit. Une telle situation, lorsqu’elle se produit, s’aggrave encore lorsqu’il fait chaud car la solubilité de l’oxygène dans l’eau (comme celle de tous les gaz) diminue lorsque la température augmente.

Les régions littorales et les estuaires ne sont pas épargnés par l’eutrophisation car leurs eaux sont peu brassées et reçoivent beaucoup de rejets issus de l’activité humaine. C’est en particulier le cas de nombreux estuaires bretons.
Dans les cours d’eau rapides, en revanche, dont l’eau est en permanence renouvelée et mieux oxygénée et les algues constamment entraînées toujours plus loin par le courant, aucune accumulation n’est possible.

Ce processus naturel est très lent : il peut s’étaler sur des siècles ou des millénaires, et parfois sur de plus longues périodes encore. Mais l’eutrophisation peut être fortement accélérée par l’apport d’effluents domestiques, industriels et/ou agricoles et conduire à la mort de l’écosystème aquatique en quelques décennies voire même en quelques années. On parle alors d’hypereutrophisation ou encore de dystrophisation (voir le chapitre Dégradations).

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